C’est le projet industriel le plus important jamais vu dans le département et, forcément, dans l’Agglomération d’Épinal. L’objectif de la société Verso Energy, spécialisée dans la production d’énergies renouvelables, de créer une unité de production de carburants de synthèse pour avions sur l’écoparc de Chavelot , que nous avions révélé en avril 2024, est sans commune mesure avec tous les autres ayant déjà mis les pieds ou étant en passe de le faire, sur la Green Valley d’Épinal.
Les chiffres en témoignent : 1,4 milliard d’euros d’investissement, une emprise foncière de 25 hectares, 800 personnes sur le chantier de construction et 250 emplois directs ou indirects : le dossier est hors-norme et suscite forcément beaucoup d’attention de la part des collectivités locales.
Une configuration unique au monde
Le projet est également d’ampleur pour Verso Energy, créée en 2021 seulement, mais faisant feu de tout bois dans la production d’énergies, que cela soit l’électricité verte via des centrales photovoltaïques, comme à Liffol-le-Grand, l’hydrogène, mais aussi les carburants de synthèse donc. Encore plus fort, Verso Energy a lancé six autres projets identiques à celui de Chavelot : trois en France (Bordeaux, Limoges, Rouen), deux en Finlande et un aux États-Unis, tant en termes d’investissement que de production d’e-SAF, les carburants, à hauteur de 81 000 tonnes par an.

L’Agglomération d’Épinal comme les communes de Golbey et de Chavelot sont évidemment très enthousiastes à l’idée de concrétiser le projet de Verso Energy. Photo Léa Didier
« Étant donné le niveau des études et des développements, il faut mener de front plusieurs projets standardisés afin de mutualiser les coûts », explique Antoine Huard, le cofondateur et directeur général qui a déjà levé 50 millions d’euros pour se mêler à la course dans la production de SAF (Sustainable Aviation Fuel).
À Chavelot donc, comme dans les autres projets cumulant près de 10 milliards d’euros, Verso veut créer du carburant de synthèse en utilisant le gaz carbonique (CO2) rejeté par la papeterie NSG, mais aussi par la chaudière biomasse de Green Valley Energy , la plus grosse de France.
Sur l’écoparc, sur un même site, chose unique au monde, seront construites quatre unités distinctes, mais reliées. Une pour capter le CO2, une pour produire de l’hydrogène, une pour créer un méthanol de synthèse issu du mélange CO2-hydrogène, et enfin une unité de production d’e-SAF. « On n’en est pas encore à l’inauguration. Je mesure le chemin qu’il reste à faire », a toutefois reconnu Antoine Huard au moment de repréciser son projet qui va faire l’objet d’une concertation préalable du public encadrée par la commission nationale du débat public (CNDP).
100 m3 d’eau à l’heure
Le projet de Verso à Chavelot, baptisé « Ep’hyNE », ne devrait être définitivement acté que fin 2026, voire début 2027. Car il reste à obtenir les autorisations nécessaires, les permis de construire, les financements et les futurs clients sachant que l’Europe va imposer aux compagnies de mettre 1,2 % d’e-SAF dans les réservoirs de leurs avions d’ici 2030. C’est normalement à cette date qu’entrera en fonction l’usine de Chavelot.

Le projet de production de carburant de synthèse pour avions porté par Verso Energy et devant s’implanter sur l’écoparc de Chavelot a fait l’objet d’une présentation ce lundi. Photo Léa Didier
Une hypothèse qui suscite logiquement l’enthousiasme général. Verso Energy a ainsi obtenu le partenariat de RTE, afin qu’il lui fournisse l’électricité nécessaire. Laquelle proviendra d’une ligne aérienne à 400 000 volts reliée à la centrale électrique de Vincey. Verso a aussi validé le partenariat avec Norske Skog et GVE pour que ceux-ci lui fournissent les 300 000 tonnes de CO2 annuelles.
NSG pourrait aussi aider le projet Ep’hyNE au niveau de l’alimentation en eau qui va s’avérer un élément fort du dossier. Car Verso va avoir besoin de 100 m3 d’eau par heure, 24 heures sur 24. « On va réutiliser l’eau rejetée par la papeterie et aussi puiser dans la gravière qu’elle utilise », a ainsi dévoilé Antoine Ghesquiere, ingénieur chez Verso, en anticipant les éventuelles questions des journalistes, mais aussi du public dans le cadre de la concertation préalable qui va se dérouler du 24 avril au 22 juin, et sur laquelle nous reviendrons prochainement.