Dans son atelier, chaque carrosserie reprend vie comme au siècle dernier. Mehdi Vidal restaure les véhicules anciens en recréant à la main des pièces oubliées, guidé par les archives.
Quand il parle de son métier, une étincelle s’allume dans les yeux de Mehdi Vidal, ses traits s’animent, son ton se fait plus enjoué et passionnant. À la vue de son bureau, occupé par un bureau au large écran d’ordinateur incurvé, et une table de dessin, ornée d’un plan millimétré qu’on devine tracé d’une main assurée, on pourrait le penser architecte ou dessinateur de vêtements de luxe ; mais quand on passe dans l’atelier, on comprend sa vocation de sculpteur de métal pour les autos anciennes, qui trahissent son immense savoir-faire, sa technique rigoureuse et une riche culture.

Un alliage de savoir-faire que le natif de Toulouse cultive depuis longtemps, acquis lors de son parcours professionnel étoffé. Pour se spécialiser dans ce domaine de la restauration de véhicules anciens et de fabrication de pièce sur mesure à la main, il est d’abord passé par les Compagnons du devoir. C’est avec l’association, reconnue pour inculquer des compétences de qualité dans des métiers manuels ou artisanaux, qu’il a entamé son périple de Tour de France, afin de découvrir différentes techniques et cultures au long du parcours.
France, Angleterre, … Pendant 9 ans, l’homme bourlingue, vadrouille, avant de poser ses valises à Rimont. Entre-temps, un col bleu-blanc-rouge, distinctif des Meilleurs ouvriers de France (Mof) est venu se greffer sur son col. Preuve supplémentaire de l’expertise du tôlier, qui met son savoir-faire à destination des particuliers. Ici, pas de Porsche flambant neuve, de Ferrari dernier cri, de Rolls-Royce rutilante : à l’atelier, on se concentre sur des véhicules du début du XXe siècle jusqu’aux années 1970, pour des chantiers prenant en moyenne 1 000 heures.
L’importance capitale des archives
C’est que la tâche n’est pas simple. Il faut garder en tête une règle cardinale : respecter les techniques en œuvre à l’époque de construction de la voiture pour leur redonner leur éclat d’antan. Parfois, il faut recréer les pièces à partir de photos d’époque apportées par les clients ; une autre fois, ce sera direction les archives pour retrouver un plan, une description ou une technique pour retravailler le métal comme c’était fait autrefois. Lors d’un voyage aux États-Unis, Mehdi Vidal est tombé sur des livres des années 20 français, spoliés pendant la Seconde guerre mondiale, narrant les techniques de construction dont les tôliers français n’avaient plus de trace et donc pas de moyen d’étudier : ici et là, en farfouillant dans les archives, il fait des découvertes qui permettent donc de redécouvrir ces procédés d’avant, que son atelier remet en œuvre presque un siècle après.
Car la curiosité est clé : c’est par ce biais que le savoir-faire se perpétue. Ainsi, il y a peu, le tôlier s’est rendu à Angoulême, dans le seul atelier de menuiserie pour voiture. On ne le sait peut-être pas, mais les voitures des débuts possédaient une ossature en bois recouverte de tôle. Alors, aux côtés de ce menuisier qui va bientôt partir en retraite, l’Ariégeois a appris cette technique difficile de torsadage du bois, qui donnait sa forme fuselée aux voitures ; et pourra donc satisfaire les clients passionnés du menuisier, dont il va reprendre le flambeau. Encore une corde à un arc déjà bien fourni.