Et pour produire cet hydrogène, un gaz qui n’est pas sans danger, l’industriel va se doter de l’un des plus gros électrolyseurs au monde, d’une puissance de 450 mégawatts (MW) et qui consommera 3 millions de mètres cubes d’eau par an.
Toutes ces données étaient au cœur des débats, mardi soir dans les bureaux de la CC Lacq-Orthez, à l’occasion du quatrième comité de suivi organisé dans le cadre de la concertation continue.
Très vite, les échanges se sont arrêtés sur deux aspects : la sécurité et les ressources nécessaires pour cette unité. Tout au long de la soirée, les représentants d’Elyse Energy ont tenté de rassurer l’assistance.
Et pour les appuyer dans cette tâche, se sont exprimées les équipes de Rely, une société proposant des solutions intégrées d’hydrogène vert, née de la joint-venture du Français Technip Énergies et du Belge John Cockerill. « Leur expertise est reconnue, ils ont l’expérience » a souligné Alain Buzy-Pucheu, responsable de projet chez Elyse Energy.
« Des risques à chaque étape »
Ainsi, Rely, qui travaille sur HyLacq depuis juillet, n’a pas éludé le danger de l’hydrogène, son inflammabilité, son potentiel explosif, quand ce gaz est mélangé à l’air ou l’oxygène, les possibilités de fuites, difficiles à détecter. « Il existe des risques à chaque étape de production » reconnaît Rely.
Pour les limiter, les prévenir, cette société prône une standardisation au service de la maîtrise des risques quand il s’agit de monter des concepts d’installations complexes : équipements extérieurs, « jamais en limite de propriétés », ventilation, surveillance permanente, séparation des unités, torchage (d’où sort de la vapeur d’eau) en cas de dysfonctionnement. « Il y a une très faible probabilité d’accident. Une sur un million » assurent ces experts.
Une de trop pour les riverains et associations qui s’opposent au projet. « Cette unité ne devrait pas être installée à cet endroit. Le choix aurait dû être fait en fonction de la population et non de l’accès au foncier » ont indiqué les Shifters de Pau.
« Aujourd’hui en France, il y a une vingtaine de projets d’électrolyseurs et tous sont situés à plus de 500 mètres des habitations, la plupart à 1 km. HyLacq sera le plus proche des maisons (à 200 mètres), d’une route où passent 13 000 véhicules par jour (la RD 33) et d’un méthaniseur (à côté de BioBéarn, NDLR) » ont-ils ajouté, en se lançant dans une démonstration des dégâts possibles alentour, en cas d’explosion.
« On propose que les maisons les plus exposées, on les échange avec les dirigeants d’Elyse Energy, ce qui réduira l’empreinte carbone de leur trajet domicile-travail » a ironisé Jean-Claude Bergé, de l’association des riverains, AEPS. Celui-ci s’est notamment inquiété des nuisances sonores que provoqueraient la ventilation et l’aéroréfrigération permanentes nécessaires sur le site. « Il y aura une étude acoustique » a rappelé Elyse Energy, « et s’il faut isoler les équipements, on le fera ».
« On prendra en compte le changement climatique »
Le débat a aussi rebondi sur l’eau et l’électricité indispensables pour faire fonctionner HyLacq. « Pour un kilo d’hydrogène, il faut 10 litres d’eau. Mais le rendement n’étant pas à 100 %, en tenant compte des déperditions et du refroidissement nécessaires, on compte ici 20 litres d’eau pour un 1 kg d’hydrogène » a indiqué Rely.
« Ce projet est contraire au plan national Eau, à l’état écologique du gave de Pau, aux alertes sécheresse du bassin Adour Garonne » a prévenu en retour la Sepanso 64. « Et c’est se tromper d’époque de nous répondre que le projet consommera dix fois moins d’eau que Celanese. Maintenant, on sait qu’il faut l’économiser » a abondé Peppino Terpolilli pour le collectif Forêts vivantes Pyrénées.
HyLacq doit s’implanter à Mourenx, près de la RD 33.
Elyse Energy
« En Béarn, l’eau n’a pas la même valeur en février et en août. On regarde comment en tenir compte pour limiter encore notre consommation » a répondu Alain Buzy-Pucheu. Pour pomper l’eau, Elyse Energy utilisera la pompe de Yara, qui sert toujours à Air Liquide, « et qui dispose de dégrilleurs, pour protéger le milieu naturel ».
Quant à arrêter HyLacq lors des sécheresses, Elyse Energy dit qu’elle suivra les arrêtés en vigueur, préfectoral et ministériel, concernant les installations classées. « Mais on va prendre en compte le changement climatique dans nos prévisions » a encore assuré l’industriel.
L’annonce d’un échangeur thermique
Il a aussi annoncé ce mardi avoir investi dans un échangeur thermique, mais maîtriser la température de l’eau qui sera rejetée dans le Gave de Pau, en sortie de process. « Nous avons entendu les inquiétudes. C’est pourquoi il n’y aura qu’une différence maximale de 4 degrés entre l’eau du gave et l’eau rejetée. Ce qui n’entraînera qu’un réchauffement, au plus, de 0,05°C du gave ».
Un argument qui n’a pas pesé bien lourd pour les opposants, mettant l’accent sur le gigantisme de l’opération : « E-CHO et Tartas (où le projet ReSTart porté par Verso Energy est destiné à produire du kérosène durable), c’est la consommation d’une centrale nucléaire en eau et électricité » a exposé Peppino Terpolilli.
Concernant l’électricité, Elyse Energy a reconnu une consommation « importante ». L’alimentation se fera par le réseau 400 000 volts depuis le poste RTE d’Os-Marsillon, via deux liaisons dont le passage est encore à l’étude (cela pourrait se faire par les voies ferrées). Les négociations pour les contrats d’électricité, elles, ont déjà débuté, avec l’objectif d’avoir au moins pour moitié de l’électricité renouvelable.
Un dernier comité de suivi se tiendra le 4 juin, sur l’unité de BioTJet, et l’ultime forum public devrait avoir lieu le 23 septembre.