Qui a dit que les réseaux sociaux étaient réservés aux jeunes générations ? Elles ont 50, 60, 70 ans et plus et sont bien décidées à faire entendre leur voix et ne pas disparaître des radars. On les appelle les « silver influenceuses » en référence à la couleur grise des cheveux. Très actives sur Instagram, YouTube, TikTok ou sur leurs blogs, ces femmes assument les signes de l’âge et partagent leurs conseils beauté, mode, bien être et leur quotidien à leurs milliers d’abonnés pour se libérer des injonctions de l’âge, qui touchent tout particulièrement les femmes. Elles évoquent des sujets encore trop peu abordés, surtout sur les réseaux sociaux.
« On continue notre histoire »
Nicole Tonnelle passe 7 à 8 heures par jour à créer du contenu pour ses abonnés. À la retraite, cette ex-esthéticienne de 74 ans a eu assez vite besoin de retrouver une activité. Déplorant le manque d’informations et de contenus dédiés aux femmes de plus de 50 ans sur internet, elle se lance donc d’abord dans des tutoriels de maquillage. « J’avais envie de continuer à donner des conseils, comme dans mon institut avec mes clientes », explique-t-elle.
Elle commence par un blog puis se lance sur YouTube il y a 14 ans, sans grande maîtrise technique mais avec une authenticité qui séduit rapidement 15 000 abonnés. « Ce n’est pas que pour les jeunes et j’étais étonnée de ne trouver personne de mon âge sur ces plateformes. Sincèrement, il faut toujours se battre, car nous serons toujours plus invisibles en vieillissant », regrette-t-elle.
Aujourd’hui, avec 350 000 abonnés toutes plateformes confondues, elle défend la visibilité des femmes de plus de 50 ans et leur apprend à accepter leur âge. « La vie ne s’arrête pas parce qu’on vieillit, on continue notre histoire », affirme-t-elle. Elle aime transmettre aux autres des conseils ou des messages qu’elle ne trouvait pas. « Quelqu’un qui suivait une chimiothérapie m’a dit un jour qu’elle se sentait plus apte à se maquiller avec mes vidéos, ça remonte le moral. Quand je reçois des messages comme ça, je n’ai qu’une envie, c’est de continuer à toucher le plus grand nombre de personnes », confie-t-elle.
Ne plus avoir de sujets tabous
Natacha Dzikowski, 61 ans, a un parcours ancré dans l’univers de la beauté, de la santé et du bien-être, puisqu’elle a travaillé comme publicitaire dans ces domaines. Son cheval de bataille ? Déconstruire les préjugés liés à l’âge et informer les femmes sur leur corps. « L’âge, c’est une chance. On peut le vivre sans complexe à partir du moment où on prend en main son vieillir », affirme-t-elle. Si elle maîtrise ce sujet, elle se rend compte que ce n’est pas le cas de toutes les femmes, et décide donc de créer un blog, se lance sur les réseaux sociaux et a même écrit plusieurs livres(*) pour transmettre ses savoirs. Elle aborde des sujets qui ont longtemps été tabous, comme la ménopause : « Il ne fallait surtout pas en parler il y a encore quelques années, parce que l’on voyait la ménopause comme l’obsolescence programmée des femmes. » Elle est certaine d’une chose : « Pour faire changer des préjugés aussi puissamment ancrés, il faut qu’on soit très nombreuses à en parler ».
C’est aussi le créneau de Caroline Ida, 64 ans, présente sur les réseaux sociaux depuis plusieurs années pour lutter contre l’âgisme. Elle se montre sans fard sur son compte et permet à de nombreux abonnés de se retrouver à travers ses conseils et partages. Grâce à son activité sur les réseaux, elle est même devenue mannequin pour des marques de lingerie. Des photos sont diffusées sans retouche et permettent de représenter les femmes « normales ».
Ces femmes partagent une même ambition : vieillir est une chance et non une fatalité. Elles sont aussi le signe d’une évolution des mentalités et inspirent une nouvelle génération de seniors connectées, prêtes à réinventer l’image de l’âge et montrer que l’influence n’a pas d’année d’expiration.
Natacha Dzikowski, J’ai l’âge que je veux, (Leduc).