Par Matthieu Le Gall
Quel économiste aurait pu prédire que les bonds du trésor à 30 ans émis par la Grèce seraient un jour jugés plus sûrs que les obligations américaines ? Mercredi, les tensions extrêmes sur la dette outre-Atlantique ont affolé les analystes financiers : plutôt qu’une valeur refuge, les bonds émis par Washington se sont transformés en actifs ultra-toxiques, ceux dont il faut à tout prix se débarrasser si l’on ne veut pas finir dans les poubelles des salles de marché et de l’histoire économique.
Ce renversement, c’est la manifestation concrète d’une résistance des investisseurs aux projets mercantilistes de Donald Trump. C’est un message très clair et une mise en garde : non, les marchés ne pensent pas que transformer les États-Unis en forteresse tarifaire enrichisse le moins du monde les citoyens américains. Bien au contraire.
En annonçant une pause sur les droits de douane « réciproques », à l’exception notable de la Chine, le président américain ne prétend évidemment pas céder à Wall Street. Il faudrait pour cela qu’il admette son erreur, ce qui lui est psychologiquement impossible. Au sommet de l’État, ses courtisans citent déjà l’« Art du deal » pour justifier le revirement du leader Maximo de Mar a Lago. Cette pause n’est pas un renoncement mais l’énième coup de génie du plus grand président américain.
Qui peut encore croire à de telles balivernes ? Dix pour cent de droit de douane, c’est encore trop. Et ne pensons pas que les violentes secousses infligées par l’administration Trump à l’économie mondiale sont sans conséquences. Elle en gardera toujours les séquelles.