Sous l’égide du Ministère de la Transition Numérique et de la Réforme de l’Administration, Visa a organisé à Casablanca la deuxième édition du Fintech Day, un rendez-vous désormais majeur pour les acteurs de l’innovation financière au Maroc.
Placée sous le thème « Intelligence artificielle et inclusion financière : transformer le paysage fintech au Maroc », cette édition avait pour objectif de mettre en lumière les avancées, les défis et les perspectives du secteur, dans un contexte marqué par la transformation numérique rapide et les ambitions croissantes en matière d’inclusion financière.
Le rôle « fondamental » de l’IA
Dans leurs allocutions inaugurales, la ministre déléguée chargée de la Transition Numérique, Amal El Fallah Seghrouchni, et Leila Serhan, vice-présidente exécutive et directrice générale de Visa pour l’Afrique du Nord, le Levant et le Pakistan, ont toutes deux insisté sur le rôle fondamental de l’intelligence artificielle (IA) dans la modernisation du secteur financier. Mme Serhan a salué le « dynamisme de l’écosystème fintech marocain », affirmant que « Visa croit au pouvoir de la technologie pour élargir l’accès aux services financiers » et rappelant l’ambition du groupe de « bâtir un écosystème fintech prospère, au service de tous, partout ».
De son côté, la ministre a souligné que l’IA constitue un levier stratégique pour « automatiser des processus coûteux, réduire les erreurs humaines, prévenir les fraudes et personnaliser les services ». Elle a rappelé que le Royaume s’est engagé dans une stratégie numérique ambitieuse, incluant notamment l’initiative Off Startup Maroc et le soutien massif apporté aux jeunes entreprises, avec des dispositifs de financement adaptés à chaque étape du cycle de vie entrepreneurial.
Le programme de la journée s’est articulé autour de trois panels principaux, modérés par Sami Romdhane, directeur général de Visa au Maroc. Le premier panel, consacré à la relation entre régulation et innovation, a réuni des représentants de Bank Al-Maghrib, du ministère, et du secteur privé. Les intervenants ont plaidé pour une « réglementation agile », capable de suivre les évolutions rapides du secteur sans freiner l’expérimentation.
Le second panel s’est concentré sur les dynamiques de collaboration entre institutions financières, startups et universités, notamment à travers les partenariats avec l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P). Il a été question d’interopérabilité, de partage de connaissances, de codéveloppement, et de création de passerelles entre expertise académique et besoins opérationnels du marché.
Le troisième panel a exploré les potentialités de l’intelligence artificielle dans les services financiers : personnalisation des parcours clients, détection de fraude, scoring de crédit, et gestion des risques. Plusieurs intervenants ont insisté sur la nécessité d’adopter des solutions IA « maîtrisées, éthiques et inclusives ».
Le rôle central de l’infrastructure et de l’interopérabilité
Les discussions ont également mis en avant les évolutions techniques du secteur, notamment la migration vers la norme ISO 20022 pour les paiements électroniques, l’intégration de simulateurs automatisés pour les tests de solutions, et la mise en place prochaine de sandbox technologiques. L’objectif affiché : renforcer la compétitivité des fintechs marocaines, sécuriser les transactions, et faciliter l’accès au marché.
Des acteurs comme Switch Al Maghrib (SWAM, ex-HPS Switch), ont détaillé leurs efforts pour rendre l’infrastructure plus résiliente, ouverte et adaptée aux besoins des startups. La représentante de la Fédération des Établissements de Paiement a, quant à elle, salué la levée du plafond des comptes de paiement à 100 000 dirhams, une mesure qui ouvre la voie à de nouveaux cas d’usage.
La question de l’acceptation des paiements électroniques par les commerçants, souvent réticents, a été largement débattue. Les participants ont souligné que l’adoption massive passera par la mise en place de cas d’usage à fort impact dans les zones rurales et périurbaines. « L’inclusion financière ne sera complète que si l’ensemble de l’écosystème – consommateurs, commerçants, institutions – est intégré dans la chaîne de valeur », a affirmé une intervenante.
Tous les acteurs présents – régulateurs, établissements de paiement, banques, fintechs, investisseurs, incubateurs – ont convenu de la nécessité d’avancer de manière concertée. Le Morocco Fintech Center (MFC), récemment créé, est apparu comme l’un des principaux catalyseurs de cette collaboration, en jouant un rôle d’interface entre les parties prenantes, en documentant les bonnes pratiques, et en développant des programmes de formation ciblés.
La journée s’est conclue sur un appel à intensifier les synergies pour faire du Maroc un hub régional de la fintech africaine. « Nous avons désormais les bases technologiques, institutionnelles et humaines pour accélérer », a résumé un intervenant. « Il est temps d’aller plus vite, ensemble, pour répondre aux défis de demain. »
À l’occasion de cette journée, Visa a officiellement lancé l’appel à candidatures pour la cinquième cohorte de son programme Visa Africa Fintech Accelerator. Les startups africaines, de l’amorçage aux séries A, sont invitées à déposer leur dossier avant le 15 août 2025. L’édition précédente, clôturée à GITEX Africa, avait permis de soutenir plusieurs jeunes pousses, dont les marocaines Paytik et Chari, mises en avant lors des panels pour leur parcours dans l’accélérateur.
Selim Benabdelkhalek