Au début du projet, Viktor utilise principalement trois outils bien connus du monde de l’IA : Entropy, Gemini et ChatGPT. Ces LLM (large language models) se basent sur l’immensité de données disponibles en ligne pour donner une réponse la plus complète possible à une requête tapée par un utilisateur. La première étape, pour Essembl, consiste alors à créer un mix des trois logiciels pour pouvoir déterminer, sur base des informations fournies par les utilisateurs, quels vêtements issus de leur garde- robe s’accordent bien ensemble. Leur système ainsi créé se base sur les forums de mode, des pages web qui parlent de la théorie des couleurs, etc. « Les tendances sont plus compliquées à inclure, explique Viktor Dufour. Mais nous avions réussi à créer un prototype qui fonctionnait bien. Les premiers utilisateurs recevaient des recommandations et devaient nous donner un retour pour nous dire s’ils les jugeaient pertinentes ou non. Ces feed-back ont été d’une importance cruciale. Ils nous ont permis de développer nos propres modèles. En plus des données démographiques et du style vestimentaire, notre ingénieur en IA a pu créer des modèles inhouse, au lieu de continuer à se baser sur les grandes sociétés. Pour nous, c’était plus intéressant financièrement. Cela permettait aussi pour garantir la protection des données. »
D’autres fonctions sont venues se greffer à la recommandation vestimentaire. Les utilisateurs de l’appli peuvent aujourd’hui chatter avec l’IA afin de lui poser des questions précises. Ils peuvent également, lorsqu’ils tombent sur un vêtement qui leur plaît dans une vitrine ou un magasin, le prendre en photo et demander à l’IA si cet article pourrait matcher avec un élément de leur dressing existant.
Essembl compte aujourd’hui 500 000 utilisateurs issus de nombreux pays différents (Luxembourg, États-Unis, Allemagne, France, Égypte…). D’après Viktor Dufour, aucune publicité payante n’a été faite : « nous avons dépensé zéro euro en marketing puisque mon frère a réalisé l’entièreté de notre communication via Instagram et TikTok. Tous nos clients sont venus à nous de manière organique ».
Se démarquer de la concurrence
L’utilisation de Essembl implique un certain effort puisqu’il faut prendre en photos chacun des vêtements de sa garde-robe si l’on veut pouvoir bénéficier des conseils du fashion advisor. « Pour le moment, c’est le standard de ce genre d’outil. Les gens sont obligés d’uploader les photos de tous leurs vêtements, précise Viktor Dufour. Mais on va bientôt innover sur ce point. Je suis en train de terminer une nouvelle fonctionnalité qui permettra de faire une rapide vidéo de la garde-robe au lieu de prendre chaque article en photo. Si on réussit cela, on aura vraiment un plus par rapport aux autres applis similaires. »
Le tremplin Fit 4 Start
Essembl fait partie des 20 startups à avoir été sélectionnées cette année dans le cadre du programme luxembourgeois Fit 4 Start. Au départ, il y avait 420 candidatures. Pour les deux jeunes frères, c’est la confirmation d’un réel potentiel. Mais c’est aussi et surtout une aide financière considérable, qui va leur permettre notamment d’engager du personnel et de pouvoir bénéficier de bureaux à la House of Startups. Le coaching et les connexions avec d’autres entrepreneurs vont permettre à Essembl d’évoluer rapidement.
Le prochain poste à pourvoir sera un UX designer. Selon Viktor Dufour, « c’est la personne qui manque à notre équipe. Pour le moment, le design de notre appli n’est pas si mal, mais il n’est pas parfait. Quand je dois intégrer une nouvelle fonctionnalité, le design me prend beaucoup trop de temps. Et ce n’est pas mon métier. On a besoin d’un spécialiste ».
Devenir la référence de la « reco » vestimentaire
Essembl fonctionne sur le modèle “Freemium”. De base, l’appli permet aujourd’hui d’enregistrer ses vêtements et de générer des outfits gratuitement. Il faut présélectionner au moins un article pour pouvoir en profiter. Les utilisateurs doivent également sélectionner un contexte : business meeting, mariage, date night, etc.
En souscrivant à l’offre premium, les gens ont accès à plus de fonctionnalités. Ils vont pouvoir chatter avec l’app, qui va poser des questions plus précises sur ce que la personne a l’intention de faire ensuite. Les recommandations sont plus détaillées. Également, dans la version payante, l’assistant va donner des “styling tips” et expliquer comment ajuster les vêtements ou comment les accessoiriser par exemple. La fonction “mix and match”, quant à elle, va permettre à l’utilisateur de prendre une photo dans un magasin et de savoir si l’article peut se marier avec un vêtement de sa garde-robe et comment. « À l’avenir, on réfléchit à ce que cette fonctionnalité-là soit rendue partiellement gratuite, précise Viktor Dufour. Avec plus de ressources, on pourra montrer visuellement plus de choses. »
« Dis Essembl, que dois-je porter aujourd’hui ? »
Lorsqu’on lui demande la vision qu’il a de l’avenir, Viktor Dufour ne manque pas d’ambition : « notre vision, pour l’app, réside dans une utilisation similaire à celle de Siri. Comme on demande à Siri quel temps il fait aujourd’hui, on aimerait que les gens aient le réflexe de demander à Essembl comment ils doivent s’habiller. Nous aimerions que les gens ne se rendent pas uniquement sur l’appli pour être inspirés, mais pour recevoir, sans réfléchir, des conseils d’habillement pour la journée ou l’occasion qui se présente. À partir du moment où on sait ce qu’il y a dans une garde-robe, on sait aussi ce qu’il n’y a pas dedans. On aimerait donc pouvoir aussi faire des recommandations par rapport à la nouvelle collection que telle ou telle marque qui vient de sortir. Le but serait de pouvoir travailler avec des enseignes ou des stylistes. Ce serait une nouvelle manière pour elles de proposer leurs vêtements. »
Vikto Dufour y croit : Essembl va devenir le petit « push » qui manquait à beaucoup d’entre nous pour s’habiller de manière stylée. Qu’elle soit utilisée pour le fun ou par utilité, cette nouvelle appli fait déjà le bonheur de nombreux et nombreuses fashionistas !