Quatre ans après la loi crowdfunding de 2021, le Maroc passe enfin à l’action. Entre obstacles réglementaires, résistances bancaires et défis techniques : comment expliquer ce marathon pour une mise en œuvre effective ?
C’est le prix à payer pour tout projet naissant dans un écosystème en mutation comme le Maroc. Le crowdfunding nécessite, côté offre, une régulation robuste, des infrastructures bancaires et de paiement adaptées. Côté demande, il exige des projets viables capables de mobiliser et d’exécuter. L’alignement de ces éléments a nécessité plusieurs années, tous étant interdépendants.
Le principal obstacle fut la régulation : publication des textes (18 mois), constitution du dossier d’agrément, son instruction, puis l’approbation finale. L’agrément ne signifiait pas opérationnalisation : il a fallu convaincre les banques de soutenir une activité perçue comme risquée, sans benchmark local. En tant que startup émergente, l’accès aux décideurs bancaires était limité. Une banque marocaine a finalement pris le pari. Intégrer les acteurs de paiement et développer la plateforme ont également contribué au délai. Ce qui prendrait 4 mois en Europe a nécessité 4 ans au Maroc, faute de références locales et par prudence.
Comment votre modèle économique concilie-t-il innovation et rentabilité pour assurer la pérennité de votre startup sur le marché marocain ?
Notre modèle économique est basé sur une offre de collecte de dons en ligne. Ces collectes seront sous forme de campagnes délimitées dans le temps en fonction d’un objectif attendu. Chaque campagne est vérifiée en amont de notre part sur les thématiques traditionnelles de don (solidarité, études, santé), mais aussi les campagnes de financement d’initiatives à fort impact pour des TPE & PME ou des projets culturels ou sportifs.
Par conséquent, notre modèle économique, loin de toute logique de profitabilité à court terme, se veut simple et le plus encourageant pour les donateurs avec des frais les plus bas possibles.
Au-delà des défis de viabilité de ce modèle économique, quelles sont, selon vous, les chances d’adoption du crowdfunding au Maroc ?
Sur le volet don du crowdfunding, le terrain est fertile. Les initiatives solidaires sont dans l’ADN des Marocains. Le défi est de mettre à profit la puissance du digital, du marketing et de la communication sur les réseaux sociaux au bénéfice non pas seulement de nouveaux business, mais aussi pour financer du social et rafraîchir le sens de ce terme qui est trop souvent opposé au monde économique.
Le crowdequity, ou l’investissement participatif, pourrait-il devenir le levier de transformation des PME et startups marocaines ?
Oui et de plus en plus. En lançant kiwi collecte, nous avions la conviction qu’avant de demander aux Marocains d’investir en masse, qui plus est sur un projet risqué, il fallait d’abord proposer la forme la plus simple de collecte à savoir le don. Maintenant que nous sommes lancés, nous sommes persuadés que l’investissement participatif a un vrai potentiel au Maroc.