Wero, la solution de paiement instantané soutenue par l’European Payments Initiative (EPI) et ses seize actionnaires, peine à séduire malgré une base d’utilisateurs revendiquée de plus de 40 millions.
Wero, la solution de paiement instantané soutenue par l’European Payments Initiative (EPI) et ses seize actionnaires, peine à séduire malgré une base d’utilisateurs de plus de 40 millions, revendiquée par l’initiative. Le projet à l’origine ambitieux rencontre aujourd’hui de nombreux obstacles, notamment l’abandon de certains actionnaires, des retards dans son lancement, et des difficultés à rallier tous les acteurs du secteur des paiements en Europe. Quels sont les freins rencontrés par l’initiative censée standardiser les paiements SEPA en Europe ? Quelles alternatives existent ? Éclairage.
I – L’ambition des initiatives européennes : une réponse à la domination mondiale des paiements
L’initiative EPI (European Payment Initiative, 2020) et sa récente solution de paiement wero (2024) ont émergé pour répondre à la dépendance européenne vis-à-vis des acteurs de paiement étrangers – et notamment américains – comme PayPal ou Visa. Ces solutions cherchent à unifier et moderniser les paiements au sein de la zone euro. Wero permet déjà d’envoyer et de recevoir de l’argent instantanément via un numéro de téléphone, un QR code ou une adresse e-mail.
L’objectif, soutenu par la Commission européenne, est clair : offrir une alternative européenne aux paiements transfrontaliers, avec l’ambition de faciliter les transactions SEPA, d’accélérer les paiements et de renforcer l’autonomie financière de l’UE.
II – Les obstacles majeurs à l’adoption : complexité, coûts et manque d’accessibilité
Pourtant, à l’heure actuelle, seulement 16 banques sont impliquées dans l’EPI (dont BNP Paribas, Groupe BPCE, Crédit Agricole, Crédit Mutuel Alliance Fédérale, Crédit Mutuel Arkéa, La Banque Postale et Société Générale), ce qui limite largement son adoption. En outre, les commerçants doivent ouvrir un compte bancaire dans une de ces banques pour prétendre utiliser wero, créant une barrière d’entrée importante.
Si EPI se présente comme « un concurrent de poids face aux solutions et aux schémas cartes internationales », sa solution de paiement n’est pas comparable avec les services proposés par Visa et Mastercard. Au départ, l’EPI avait été envisagé comme un concurrent direct de ces derniers mais l’ambition a été revue à la baisse début 2022 avec l’abandon du projet de carte bancaire physique. Le nombre d’actionnaires EPI/wero est passé de plus de 30 à 16. Son décollage reste donc timide, notamment en Allemagne où l’adoption demeure faible : le pays représente 5 % des volumes de Wero, d’après le directeur général adjoint du Crédit Agricole SA.
Pour contourner cette limitation, de nombreux marchands passent par des Prestataires de Services de Paiement (PSP). Étant positionnés comme les plus gros apporteurs dans le paiement, Wero, avec un prix d’entrée lourd pour les PSP, se présente comme un produit relativement élitiste qui ne prend pas en compte la globalité du marché. Ainsi, cela signifie que le nombre de PSP intégrant EPI/Wero restera limité et que les usagers des autres PSP risquent de ne pas bénéficier pleinement des avantages du SEPA instantané, notamment en termes de rapidité de réception des fonds et de disponibilité de la liquidité.
En raison de ces obstacles, le paiement SEPA instantané reste souvent hors de portée pour une grande partie des marchands, qui continuent de dépendre de solutions plus lentes et coûteuses.
III- L’alternative des solutions multicanal SEPA : simplification et autonomie pour les marchands
Face aux obstacles des initiatives européennes de paiement EPI et wero, des solutions alternatives existent et permettent une intégration simplifiée pour les (e-)marchands. Ces solutions vont parfois jusqu’à orchestrer toutes les méthodes de paiement SEPA dans une même plateforme, et peuvent centraliser et rapprocher les paiements, automatiser les encaissements et intégrer un compte bancaire professionnel, sans dépendance à une banque spécifique ou à d’autres facteurs.
Du point de vue du marchand, elles permettent de gagner en simplicité, de réduire les coûts, d’améliorer la gestion des flux financiers, et d’accéder directement aux paiements instantanés, sans intermédiaires ni contraintes. En somme, elles constituent un intérêt pour les commerçants de toute taille, y compris les artisans, indépendants, ou TPE/PME.
Seules des solutions qui répondent véritablement aux besoins des marchands (maîtrise des coûts, simplicité, et fluidité) pourront gagner leur adhésion, faire office de complément indispensable aux initiatives de paiement européennes, et réussir à s’imposer dans un marché global de plus en plus concurrentiel. Pour qu’ EPI et wero prennent réellement leur envol, il serait nécessaire d’ouvrir leur participation à plus de banques et de PSP, et de simplifier l’accès pour les marchands, un aspect négligé jusqu’alors.
En conclusion, les (e-)marchands ont pourtant de quoi être optimistes, car des outils de paiement européens complets existent, il ne manque qu’un effort d’optimisation et de standardisation des applications mobiles pour les utiliser de manière optimale. Ces solutions d’orchestration SEPA seront, d’après ce que les premières estimations des experts fintech laissent présager, capables de constituer entre 10% et 15% des transactions du e-commerce d’ici 2026.