Les médecins de plus en plus inquiets. Le 5 juin, à l’occasion de la journée mondiale de l’environnement, les Unions régionales des médecins libéraux ont écrit une lettre ouverte au gouvernement au sujet de la présence de cadmium, un métal lourd toxique présent dans des aliments de base tels que le pain, les pâtes, céréales et les pommes de terre. « Ce métal est considéré comme l”un des plus toxiques qui soient », alertent-ils. Mais les légumes-feuilles, les produits de la mer et les champignons sont également très exposés.
Le cadmium, est cancérigène, reprotoxique et peut-être même mutagène. Il est associé à des risques accrus de cancer du pancréas, du poumon, de la prostate et du rein mais aussi à une augmentation des maladies cardiaques, des problèmes de fertilité, neurologiques, osseux et des lésions rénales. Il est naturellement présent dans les sols et utilisé dans les engrais phosphatés. Il est donc introduit dans la chaine alimentaire via les cultures.
Nous y sommes tous exposés, via la cigarette pour les fumeurs, et « principalement via l’alimentation, notamment les produits de base comme les céréales, pommes de terre, pâtes, pains et produits de panification », s’inquiètent les médecins qui constatent en outre une « explosion de la contamination chez les jeunes enfants ». Une fois ingéré, il s’accumule dans le foie et les reins. Le métal « persiste et s’accumule dans l’organisme au fil des ans », écrivent les professionnels de la santé dans leur courrier.
36% des moins de 3 ans consomment trop de cadmium
En mai 2019, l’Union européenne a interdit les engrais phosphatés contenant plus de 60 mg/kg de cadmium. Malgré tout, la France reste le principal pays consommateur d’engrais phosphaté et cette mesure est insuffisante selon de nombreux scientifiques.
D’après les estimations, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation et de l’environnement (ANSES), 0,6 % des adultes ont une alimentation trop riche en cadmium. Plus inquiétant encore : 14% des enfants âgés de 3 à 17 ans en consommeraient trop. Cela monte jusqu’à 36% pour les moins de trois ans.
En 2021, l’état des lieux de l’exposition de la population française aux métaux lourds de Santé publique France révélait que l’imprégnation au cadmium chez les adultes avait presque doublé entre 2006 et 2014. « Elle est 3 fois supérieure à celle des adultes américains et plus de 2 fois à celle des adultes italiens, détaillent les médecins. Chez les enfants, la comparaison avec les pays similaires est très défavorable : 4 fois supérieure à celle des enfants américains ou allemands par exemple. »
Des mesures doivent être prises au plus vite
C’est pourquoi, ils appellent désormais les autorités sanitaires à s’aligner au plus vite avec les recommandations de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Cette dernière souhaite durcir la teneur maximale en cadmium dans les engrais phosphatés afin de réduire la contamination des sols agricoles.
Ces mesures doivent être prises dès aujourd’hui, insistent les médecins selon lesquels des décennies pourraient s’écouler avant que les effets sur les individus se fassent pleinement sentir. Aux Etats-Unis, la contamination par cadmium a diminué depuis les années 60 en raison d’une « meilleure gestion des boues d’épuration dans les sols agricoles », rappellent-ils.
En outre, les professionnels de santé réclament que le gouvernement lance des campagnes de sensibilisation à ce sujet. Ils souhaitent également une modification des menus scolaires des enfants et une promotion accrue des aliments biologiques. En effet, ces derniers sont moins exposés au cadmium. Pour finir, ils demandent de surveiller les niveaux d’exposition des patients à risque.