Depuis cinquante ans et la création de la revue de bande dessinée mythique Métal Hurlant, Jean-Pierre Dionnet est lʹune des plus grandes références en matière de science-fiction et de contre-culture. A 77 ans, le Parisien revient sur son parcours hors normes, entre frénésie créative et nuits d’excès.
Créatif insatiable, Jean-Pierre Dionnet cofonde la revue mythique Métal Hurlant en 1975 avec Druillet et Moebius, après avoir fait ses armes journalistiques dans les rédactions de Pilote, Charlie mensuel ou encore Lʹécho des savanes dont il lance la première version avec Nikita Mandryka. Jusqu’en 1987, Métal Hurlant dont il est le rédacteur en chef, bouscule la presse adulte en France.
Ce laboratoire de création propulse des légendes de la bande dessinée aux côtés des incontournables Gotlib, Mondrian, Tardi ou Bilal. Défricheur de talents internationaux, il révèle au grand public des auteurs légendaires tels que Richard Corben, Frank Margerin, Joost Swarte, Moebius et Yves Chaland. Tous contribuent à faire de Métal Hurlant un véritable ovni artistique.
La musique et le cinéma après la science-fiction
Sous l’impulsion de Philippe Manoeuvre qui devient le binôme de Jean-Pierre Dionnet, la revue s’ouvre ensuite à la musique, capturant l’effervescence électrique de l’époque. Plus qu’un simple magazine, Métal Hurlant devient le reflet d’une génération en quête de nouvelles expressions. Véritable passeur, Jean-Pierre Dionnet a ainsi contribué à façonner les contours de la pop culture de la fin du XXe siècle.
Plus tard, c’est à travers le petit écran quʹil partage son amour pour la musique et le cinéma, animant des émissions devenues cultes telles que Les enfants du rock, Sex machine et, surtout, Cinéma de quartier (1990-2007) sur Canal+. Dans les années 1990, il contribue aussi à la popularisation du cinéma asiatique via sa société de production, Des Films.
Des succès et des excès
De la Creuse à Paris, en passant par New York et l’Asie, Jean-Pierre Dionnet a donc connu un parcours hors normes, avec son lot de nuits frénétiques marquées par les excès de drogues et d’alcool qui l’ont mené à des effondrements personnels et professionnels. “A l’époque, j’avais la cocaïne la plus pure du monde qui arrivait par valise diplomatique de Colombie. On faisait des provisions à trois pour un an, mais au bout de cinq mois, on n’avait plus rien. (…) Bon, l’ennui avec la drogue à haute dose, c’est qu’un jour j’ai failli finir hémiplégique, j’ai perdu une oreille, j’ai une paupière qui est tombée, ma bouche qui s’est affaissée et j’ai eu du mal à marcher pendant quelques mois”, se souvient Jean-Pierre Dionnet dans l’émission La vie à peu près du 22 mai.
Anxieux et cyclothymique depuis, comme nombre d’artistes dont il a croisé la route, le journaliste parisien n’en deviendra pas moins une grande figure de la contre-culture. Une expérience passionnante qu’il relate plus en détail dans la nouvelle édition mise à jour en 2024 de son livre “Mes Moires – un pont sur les étoiles”.
Propos recueillis par Witold Langlois
Adaptation web: Olivier Horner
Jean-Pierre Dionnet avec Christophe Quillien, “Mes Moires – un pont sur les étoiles”, éditions Au Diable Vauvert, avril 2024.