Trois mois avant le Hellfest, la grande messe annuelle des fans metal, le festival débute ce mercredi 12 mars une tournée française de seize dates appelée Warm-up Tour et qui fera étape à Nîmes le 22 mars. Alors que la France a été propulsée sur le devant de la scène metal avec la victoire de Gojira aux Grammys Awards, Midi Libre dresse un état des lieux en région.
Après sa participation à la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024, les Landais de Gojira ont remporté un Grammy Award au début du mois de février. Un sacre considéré comme une certaine “reconnaissance mondiale”, selon Laurent Sauvagnac, programmateur au Rockstore, à Montpellier.
Depuis le début des années 2000, ce quatuor a su s’imposer au-delà des frontières et propulser le métal français sur la scène internationale. Mais pour le reste des groupes, l’évolution est plus difficile.
Pourtant la scène metal française est riche, et depuis longtemps. Ils s’appellent Lofofora, Mass Hysteria, Dagoba ou encore Tagada Jones, No One is Innocent… D’autres ont mis un terme à leur carrière comme AqME ou encore The Arrs. Mais qu’en est-il du métal en Occitanie ? Quels sont les groupes ? Combien sont-ils ? Quels sont les événements ?
“La scène est vivace”
Entre amateurs et professionnels, il est difficile de quantifier exactement le nombre de groupes dans la région mais “des groupes, il y en a”, assure François Pinchon, dit Fyfy, président et programmateur de la Secret Place TAF à Saint-Jean-de-Védas (Hérault).
“La scène est vivace, il n’y a jamais eu autant de groupes de metal”, affirme-t-il, en rappelant que la salle proche de Montpellier produit entre 120 et 150 concerts par an, dont 70 de metal en comptant le hardcore. Cette figure de la scène montpelliéraine dénombre plus d’une soixantaine de groupes dans la métropole, avec plus d’une vingtaine de styles différents. “Il y a du grind, metal symphonique, thrash, deathcore, doom, les tributes (groupes de reprises) et même du glam.”
Mais la scène metal souffre tout de même, notamment depuis la pandémie du Covid-19. “Ça n’a pas été un bon moment, il y a eu trois ans de reconstruction derrière”, avance Alex, guitariste du groupe montpelliérain Gravity, qui jouera au mois de mai prochain à la Moba à Bagnols-sur-Cèze (Gard). La formation héraultaise a notamment joué avant les Marseillais de Dagoba au Just’n’Fest (festival dédié à ce genre) en octobre dernier à Saint-Just (Hérault).

À Montpellier, la baisse du nombre d’associations et les fermetures de bars avec salles de spectacle se font ressentir. “J’ai l’impression que la scène locale est sur une pente descendante. On constate que c’est devenu plus compliqué de faire des événements metal”, regrette Charles, 40 ans, bassiste du groupe héraultais Hypno5e.
“Avant, il y avait beaucoup de salles, comme le Black Sheep, un autre bar dans la rue de l’Aiguillerie. Il y avait bien cinq ou six établissements qui faisaient des concerts en ville à Montpellier. Maintenant, il y en a presque plus, ça se compte vraiment sur les doigts de la main.”
Un autre facteur peut expliquer les difficultés des petits groupes, ceux dits “sur la pente ascendante” : le mode d’écoute. “Ils sont tributaires de Spotify et d’un système. Maintenant, il faut faire des vues, être dans les playlists, sortir des singles. Les gens n’écoutent plus la musique de la même manière”, constate le musicien héraultais. Éric Cambray, fondateur de Metalorgie, média consacré au metal depuis plus de 20 ans confirme ces habitudes d’écoutes “très différentes”, notamment entre les différents styles de musique.
Le Warm-Up du Hellfest à Nîmes
À Nîmes, dans le département voisin du Gard, Paloma est l’une des principales salles de concerts. Avec son label SMAC (Scène de Musiques Actuelles), des groupes locaux peuvent être mis en avant, notamment en faisant les premières parties des têtes d’affiche, comme Uncomfortable Knowledge, groupe de sludge gardois, qui s’était produit avant Mass Hysteria en octobre 2024.
“On a une vingtaine de groupes dans nos locaux qui sont dans ces esthétiques musicales. Il y en a certains que l’on accompagne dans leur processus de création et par l’intermédiaire de résidence artistique”, explique Fred Jumel, directeur de Paloma, qui souligne que sur les 140 dates annuelles, 7 % sont accordés au metal.
Le responsable de l’établissement indique que des ateliers dans les écoles du département sont mis en place. Paloma accueillera également le 22 mars prochain le Warm-Up du Hellfest. Si les artistes sont imposés par le festival, “le deal, c’est qu’on propose un groupe local”, relate Fred Jumel. Ainsi, Eiga, groupe de metalcore modern de Montpellier, se produira aux côtés de Novelist et Nervosa.
Le Festival de Nîmes anime chaque été la capitale gardoise. Au détriment des groupes locaux, ce sont les pointures internationales comme Rammstein, Slipknot, Gojira, System of a Down ou encore Nightwish qui envahissent les arènes. Scorpions et Korn ont rejoint la programmation pour l’édition de 2025.
“En France, on ne vit pas du metal”
Dans les Pyrénées-Orientales, la passion pour les fondamentaux du genre est manifeste. “On est amoureux de la culture heavy metal française”, insiste Laurent, batteur du groupe Tentation originaire des Pyrénées-Orientales, qui a la particularité d’avoir ses textes en français.
Si l’ensemble musical est composé “d’une bande potes sans ambition” qui voulait avant tout “prendre du plaisir”, le pessimisme semble prendre le dessus quant au développement de la scène locale. Malgré l’ouverture du Nautilus, lieu culturel à Perpignan, “ici, il n’y a pas d’endroit où l’on peut se produire. En France, on ne vit pas du metal”, regrette le musicien de Torreilles.
Toutefois, une seconde formation de power metal aux paroles anglaises et poétiques se fait remarquer sur la scène catalane : Blind Wisdom. Christophe Marty (chanteur et guitariste) pointe également du doigt le manque de salles, mais les concerts, “c’est essentiel”. “C’est un peu comme un havre de paix. Quand on joue, on s’éclate, c’est un exutoire.”
Mais un événement annuel, qui rassemble un public passionné et international, a de quoi ravir les mordus de heavy metal. Le Pyrenean Warriors Open Air a été mis en place par les membres de Tentation. La programmation est encore incomplète mais des groupes mythiques tels que Jag Panzer ou encore Q5 seront à Torreilles le 13 septembre prochain.