La société Waga Energy vient de réaliser une première à Clermont-Ferrand. Spécialiste de l’épuration du biogaz des sites de stockage de déchets, elle a concrétisé un projet hybride avec le biogaz d’une méthanisation. Le tout est valorisé en biométhane pour le réseau de gaz.
Depuis une dizaine d’années, la société grenobloise Waga Energy s’est spécialisée dans un domaine bien particulier : elle récupère le biogaz émis par les installations de stockage de déchets non dangereux (ISDND), généré par la décomposition des déchets organiques enterrés, et elle l’épure pour en faire un biométhane injectable dans le réseau de GRDF.
L’opération repose sur une innovation brevetée par la jeune entreprise lors de sa création en 2015 : dans sa Wagabox®, elle combine une filtration membranaire et une distillation cryogénique pour séparer le méthane des autres composants contenus dans le biogaz des ISDND.
« Cette technologie de rupture a été obtenue après 15 années de R&D. La partie membranaire permet d’extraire le CO2, et la partie cryogénique permet de filtrer l’azote et l’oxygène d’un côté et le méthane de l’autre. En effet, en les portant à – 160°C, le méthane devient liquide et descend dans la colonne de distillation tandis que l’azote et l’oxygène, restés gazeux, sont extraits » explique Nicolas Paget, directeur général délégué de Waga Energy.
L’opération permet d’obtenir un biométhane conforme aux spécifications demandées par GRDF (plus de 98 % de méthane) avant de l’injecter dans le réseau de gaz à 3,9 bar.
Coupler deux sources différentes de biogaz : une première !
À Clermont-Ferrand, un projet initié en 2020 a enfin été mis en service fin 2024. Il concerne l’ISDND de Puy-Long (80 mètres de haut, 80 Mt de déchets stockés) géré par le syndicat Valtom et une unité de méthanisation qui est intégrée au pôle de valorisation des déchets ménagers Vernéa juste à côté.

L’originalité a été de concevoir le couplage des deux sources de biogaz : d’un côté celui de la méthanisation riche en CH4 (plus de 50 % de la composition du gaz) à hauteur de 1,3 Mm3/an, et de l’autre celui de l’ISDND, un peu moins riche (40 à 55 % de CH4) mais en plus grande quantité (6 Mm3). « Au fil du temps, la plus grande collecte de déchets organiques va augmenter l’apport de biogaz par la méthanisation, tandis que le gisement du biogaz de l’ISDND diminuera », précise Olivier Mezzalira, directeur général du Valtom.
Trois défis ont dû être relevés par Waga Energy et le Valtom, qui ont créé ensemble une société dédiée, Valtom Énergie Biométhane. Le premier défi, réglementaire, a été de faire accepter ce biogaz hybride par l’administration, car ce n’était pas prévu dans les textes. Le second, tarifaire, a obligé à montrer la viabilité économique du projet en optant pour le tarif d’injection du biométhane le plus bas, celui prévu pour les ISDND.
Le dernier défi, technique, a consisté à trouver la bonne consigne de régulation pour mélanger les deux biogaz, celui de la méthanisation arrivant comprimé, et celui de l’ISDND étant acheminé par dépression.
Ce couplage est une première en Europe. Lors de l’inauguration le 13 mai, le préfet du Puy-de-Dôme, Joël Mathurin, n’a pas manqué de le rappeler en soulignant « l’audace technologique, partenariale et administrative de ce projet qui participe à la stratégie nationale de la France et à la recherche d’une plus grande souveraineté énergétique ».
Le mélange des deux biogaz dans un volume tampon est épuré de l’H2S qu’il contient, et il est séché. Il passe ensuite dans la Wagabox® pour finir de l’épurer avec une production prévue de 15 GWh par an de biométhane, de quoi satisfaire la consommation en gaz de 2 000 ménages ou de 60 bus avec une ressource locale et renouvelable.
L’installation de Valtom Énergie Biométhane a nécessité un investissement de 3,5 millions d’euros, incluant une subvention de l’Ademe de 390 000 euros et un financement participatif d’Enerfip de 180 000 euros. Les émissions de gaz à effet de serre évitées sont estimées à 2 500 tCO2eq par an.
Un développement qui s’internationalise
Avec ce projet clermontois, Waga Energy compte désormais 23 sites en exploitation en France, auxquels s’ajoutent trois projets en construction. À la suite de sa première installation mise en service en France en 2017, l’entreprise a aussi développé sa présence à l’international. Destination ? Le Canada (quatre installations et une en construction), les États-Unis (trois installations et douze en construction), l’Espagne (une installation et une en construction) et l’Italie (deux en construction).
Entrée en Bourse à Euronext Paris en 2021, l’entreprise compte désormais 250 salariés, dont 180 en France. Côté technique, elle regarde de près la possibilité de capter le CO2 issu du biogaz, avec un site pilote en cours de développement.