La fintech Klarna, spécialiste du paiement fractionné, avait annoncé il y a quelques mois des suppressions de postes massives pour remplacer tout son service client par de l’IA. Finalement elle se met à réembaucher des humains…
“Nous avons sous-estimé ce que nous avions à perdre…” Constat en forme de mea culpa du patron de Klarna, technosolutionniste convaincu, qui se considère lui-même comme “le cobaye préféré d’OpenAI” et qui voit en Klarna une entreprise “AI first”.
Il y a quelques mois on avait beaucoup parlé de cette décision de supprimer 1800 postes pour mettre de l’IA partout dans ses services marketing et client. Sebastian Siemiatkowski estimait que ChatGPT était devenu tellement puissant qu’il pouvait abattre sans problème le travail de 700 agents humains, avec un taux de résolution de moins de 2 minutes par demande contre 11 minutes avec les humains.
Ça, c’était sur le papier. Sauf que dans la vraie vie, visiblement les clients en ont ras le bol de l’IA: des réponses automatisées souvent à côté de la plaque, et surtout un manque de nuance et de subtilité. Un chatbot, aussi performant soit-il a encore du mal à lire entre les lignes, détecter l’émotion dans la voix d’un client en colère, faire preuve d’empathie ou improviser dans une situation inédite.
Bref, une perte de qualité évidente… D’où ce retour en arrière: concrètement aujourd’hui, les deux tiers des relations clients vont continuer à être gérées par de l’IA, mais les clients auront toujours l’option de parler à un humain, ce qui fait toute la différence quand on est face à un problème complexe.
Pas de baguette magique
Ca montre bien que l’humain ne se remplace pas si facilement que ça et qu’il y a un coût caché à l’automatisation à marche forcée: la perte de lien, de nuance et d’intelligence sociale, surtout dans le service client.
Pour le dire simplement, en tant que client, on veut de l’humain. C’est ce que confirme une grande étude sur le service client publiée l’an dernier: 4 clients sur 5 affirment que lorsqu’on leur donne le choix, ils préfèrent patienter en ligne pour parler à un humain plutôt qu’avoir à faire avec un chatbot immédiatement.
Ensuite, les clients estiment que sur la compréhension de problèmes complexes, la facilité à obtenir une réponse et surtout l’évacuation de la frustration, c’est quand même beaucoup mieux de parler à un humain.
Enfin, les clients ne sont pas dupes: 6 sondés sur 10 estiment que les entreprises mettent en place des assistants IA dans leur service client non pas pour améliorer le service mais pour réduire les coûts…
D’ailleurs Klarna n’est pas la première -et probablement pas la dernière- à revenir en arrière. Il y a même eu quelques ratés mémorables comme ce chatbot mis en place par Air Canada, qui faisait des fausses promesses de tarifs réduits aux clients. L’entreprise a même été condamnée à rembourser un client qui avait perdu de l’argent à cause de ces hallucinations.
On peut aussi penser à McDonald’s, qui a testé pendant deux ans avec IBM un drive complétement automatisé grâce à l’IA, dans plus de 100 restaurants, où on pouvait passer vocalement sa commande, avant de finalement abandonner le projet, au moins temporairement.
Ce qui fonctionne bien aujourd’hui, ce sont les modèles hybrides, où on va se servir de la puissance de l’IA pour augmenter les capacités d’un opérateur humain. Par exemple en lui soufflant à l’oreille les meilleures réponses possibles à un client. Mais c’est l’humain qui garde le contrôle. En tout cas pour l’instant.